Le rapport remis le 28 mars au gouvernement sur le grand âge et l’autonomie, comporte des pistes intéressantes. De nombreuses propositions issues de la contribution de l’UNAF ont été reprises. Les familles sont confrontées à la dépendance d’un parent, d’un conjoint ; elles doivent organiser sa prise en charge, et faire face à des restes à charge parfois très élevés, avec le risque de provoquer des conflits familiaux durables. Ce qui rend d’autant plus regrettable, l’absence de mention explicite des familles dans la synthèse, et la faible référence aux familles en tant que telles, dans le rapport. Réduite au vocable technocratique de « proche-aidant », la solidarité familiale est pourtant bien différente de celle d’un voisin ou d’un professionnel. Les familles sont en première ligne : le projet de loi annoncé par la Ministre Agnès BUZYN pour l’automne, devra en tenir compte.
Il faut davantage accompagner les familles
Le projet de loi devra apporter des solutions pour réduire les restes à charge les plus élevés, tant à domicile qu’en établissement, d’autant plus que des dispositifs légaux comme l’obligation alimentaire et la récupération sur succession font appel à la solidarité familiale pour y faire face. La proposition de fixer le plafond de ressources à 1 600€ pour bénéficier d’une réduction du reste à charge pose un problème de seuil ; pour les revenus un peu plus élevés, le reste à charge restera excessif, entraînant une réduction du reste à vivre tant pour le parent âgé, que pour les enfants appelés à contribuer.
L’UNAF avait préconisé un « bouclier » limitant les restes à charge dans le temps, solution reprise dans le rapport, de même qu’une réforme de l’obligation alimentaire, là aussi partiellement reprise par le rapport.
Les « aidants » sont en très grande majorité familiaux. L’indemnisation du congé pour les aidants et l’obligation faite aux entreprises de traiter la conciliation vie familiale-vie professionnelle des salariés en y intégrant la problématique de la perte d’autonomie, répond à une vraie nécessité. Il faudra compléter ces mesures par la prise en compte, dans la réforme des retraites, des périodes d’éloignement de l’emploi dues ces obligations familiales.
Une meilleure politique pour les personnes âgées passe par une meilleure politique familiale. Les familles, notamment celles ayant charge d’enfants, doivent pouvoir exercer leur rôle de solidarité auprès de leurs aînés, sans sacrifier leur niveau de vie, ni leur activité professionnelle. Toute politique qui consisterait à réduire à nouveau les aides aux familles pour redéployer sur l’aide aux personnes âgées serait incohérente et coûteuse pour la collectivité.
L’UNAF s’étonne de la proposition du rapport de financer les dépenses de 2020 à 2024, en recourant à la sous-indexation des pensions en 2020 ; pourtant, cette disposition a été censurée par le Conseil Constitutionnel.
Les pouvoirs publics qui sollicitent toujours davantage les familles, doivent les soutenir. La loi du 23 mars 2019 réformant la Justice, transfère plus de responsabilités aux familles, par le biais des habilitations familiales, afin d’alléger le travail des juges et de réduire les dépenses publiques. Dans l’exercice de la protection de leurs proches, les familles doivent être assurées de pouvoir bénéficier de services d’information et de soutien aux tuteurs familiaux, pérennes, et présents partout sur le territoire. La Loi devra le prévoir.
L’amélioration de la qualité de vie des personnes âgées et de leurs familles
L’UNAF partage les préconisations avancées, notamment : le développement de formes innovantes d’habitats inclusifs, intermédiaires entre domicile et établissement, comme le dispositif des « familles gouvernantes » proposé par de nombreuses UDAF ; de même que le regroupement de l’information au plus près des familles, sur le modèle des sites d’information et de soutien aux aidants familiaux réalisés par les UDAF.
La protection juridique des personnes âgées, angle mort du rapport
Des propositions fortes sont avancées en termes de revalorisation des métiers autour de la prise en charge des personnes âgées, à domicile, comme dans les établissements, en termes de salaires, de carrières, de reconnaissance des métiers, et d’une meilleure prise en compte dans la tarification, du temps passé par les professionnels, notamment dans le secteur du maintien à domicile, et sans surcoût pour les familles. L’UNAF salue la décision de la Ministre de s’attaquer immédiatement à cette réforme, sans attendre la Loi.
Mais il faut y intégrer le secteur de la protection juridique des majeurs, qui a été oublié ! L’UNAF regrette l’absence de toute référence à ce dispositif, qui concerne pourtant plusieurs centaines de milliers de personnes âgées vulnérables, et des milliers de mandataires. Un rapport interministériel de 2018 prône un meilleur accompagnement des personnes protégées dans le respect de leurs droits et libertés, et une meilleure reconnaissance des professionnels du secteur. Il faut revaloriser les métiers des mandataires confrontés à des difficultés de même ordre que celles des professionnels intervenant au domicile ou dans les établissements. C’est tout aussi urgent.
Une reconnaissance des principes de notre système de protection sociale
La problématique du financement est évidemment centrale. Le rapport fait plusieurs propositions qui ont pour dénominateur commun de faire appel à la solidarité nationale et au principe de l’universalité selon lequel on contribue selon ses moyens et on reçoit selon sa situation. Il s’agit donc d’étendre au risque social de la dépendance, les principes du modèle de protection sociale issu de 1945, qui s’applique à la famille, à la vieillesse et à la maladie. L’UNAF se réjouit que ces principes, parfois décriés et remis en cause pour la politique familiale, soient pleinement reconnus pour leurs garanties en termes d’équité et d’efficience.
L’UNAF partage pleinement les 3 priorités dégagées par la Ministre Agnès BUZYN en vue d’un projet de loi prévu pour l’automne : améliorer la qualité des prises en charge à domicile et en EHPAD, baisser le reste à charge des familles, revaloriser les métiers du grand âge. Elle entend continuer à contribuer à ce chantier.